Les atomes radioactifs que sont les radioisotopes ont apporté beaucoup à la biologie. Ils sont aussi au cœur de la médecine nucléaire. Ces atomes instables se comportent comme des atomes stables ordinaires en dehors de l’unique et fugitif instant où ils émettent leur rayon. Leurs propriétés chimiques et physiques sont celles de l'espèce auxquelles ils appartiennent. Ils se lient comme eux avec d'autres atomes pour former des molécules.
Les rayons alpha, ou bêta, ou gamma qu'ils émettent durant leur fugitive désintégration radioactive signalent leur présence. Minuscules objets de la physique, les radioisotopes sont innombrables même en proportion infime dans la matière. Grâce aux rayons qu'ils émettent, on peut les localiser à l'aide de bons détecteurs. Ils sont les espions du vivant, les outils du diagnostic.
En thérapie, les rayons sont utilisés comme une arme. On cherchera à bombarder des tumeurs à partir d'une source externe ou au moyen d'implants situés à proximité des cellules malignes.
L'utilisation des radioisotopes pour le diagnostic est de loin la plus répandue.
Depuis la découverte de la radioactivité artificielle en 1934, les médecins nucléaires et les biologistes disposent de toute une panoplie d'isotopes radioactifs servant d'indicateurs et de marqueurs. Grâce à ces isotopes radioactifs, il est possible de suivre à la trace un atome ou une espèce chimique sans perturber les comportements physiques, chimiques ou biologiques.
LE TECHNETIUM DANS LE TRAITEMENT DE CELLULES CANCEREUSES
Le technétium, qui ressemble chimiquement au potassium, est une curiosité de laboratoire. Les périodes de ses trois isotopes instables s'échelonnent entre 215000 et 2.6 millions d'années. Ces durées paraissent bien longues par rapport aux échelles de temps humaines, mais elles sont très courtes en regard des 4,5 milliards d'années de la Terre. Le technétium a eu largement le temps de disparaître de l'environnement terrestre.
Depuis une cinquantaine d'années, le technétium est recréé artificiellement dans les réacteurs et pour des usages médicaux. L'isotope 99 en particulier est produit avec une certaine abondance. Sa période étant de 215000 ans, il fait partie des produits de fission à vie longue. Assez mobile, il contribue à la radiotoxicité ultime à très long terme des déchets nucléaires. C'est un des noyaux dont on cherche à se débarrasser (par transmutation) avec l'iode-129 et le cesium-135, afin de réduire la toxicité des déchets radioactifs au delà d'un millier d'années.
L'isotope appelé technétium-99m est un noyau encore plus curieux, car il s'agit d'un isomère à vie longue du technétium-99. En physique nucléaire, on appelle isomères des noyaux qui se maintiennent anormalement longtemps dans un état d'excitation. Normalement, les états excités retournent à l'état normal au bout d'une fraction de seconde. Il arrive exceptionnellement que la transition soit inhibée et très ralentie. Tel est le cas du technétium-99m qui subsiste plusieurs heures avant de retourner à l'état normal du technétium.
Cet état excité porte un nom, le technétium-99m qui le distingue du technétium-99 ordinaire. Le technétium-99m est obtenu dans les hôpitaux à partir d'un noyau radioactif précurseur, le Molybdène-99 généralement produit dans un réacteur. La période radioactive de 66 heures de ce précurseur donne le temps de le transporter à l'hôpital. La période radioactive du technétium-99m est elle même longue de 6 heures. Ceci donne le temps de l'utiliser dans un produit radiopharmaceutique pour un examen.
Le technétium-99m émet un photon gamma unique de 140 keV pour se désexciter, sans rayonnement bêta associé. Il est très recherché pour des diagnostics médicaux. Les rayons gamma sont absorbés loin de l'organe examiné ce qui minimise les dangers pour la matière vivante.
Dans un hôpital, le délai de quelques heures permet d'extraire chimiquement le technétium-99m, de le faire passer dans un sérum, puis de l'injecter à un malade afin de procéder à des examens par gamma-caméra. Le 99Tcm est l'isotope radioactif le plus utilisé dans le monde en imagerie scintigraphique. Plus d'un million de scintigraphies au technétium sont actuellement réalisées en France (2017), huit millions en Europe, plus de 30 millions à l'échelle mondiale.